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L'histoire

Wendel certifie Bureau Veritas pour la Bourse 02.10.07

Après un long investissement minoritaire de la holding familale, Wendel a repris le contrôle de BV pour booster sa croissance, d’abord organique puis externe… une croissance liée à celle de l’économie, à l’accélération de la globalisation et des nouvelles réglementations.
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Voilà ce qui ressemble au prochain gros coup de Wendel Investissement. L’introduction en Bourse de Bureau Veritas, annoncée pour la fin 2007, signera probablement un nouveau succès pour la société d’investissement de la rue Taitbout. «Formidable, extraordinaire.» Jean-Bernard Lafonta, président du directoire de Wendel, ne tarit déjà pas d’éloges pour qualifier le développement du spécialiste de l’évaluation et de la certification au sein de son groupe. Une histoire que les deux partenaires écrivent depuis une quinzaine d’années. Une durée qui ne fait pas de BV la plus «vieille» ligne de la holding de la famille Wendel (Oranje-Nassau est détenue depuis près de 95 ans et Stallergènes depuis plus de 15). Mais Bureau Veritas est devenue en 2004 la plus importante valeur du portefeuille de l’investisseur. L’an dernier, sa facturation a atteint 1,8 milliard d’euros. Et sur le premier trimestre 2007, BV affiche un chiffre d’affaires consolidé de 470 millions d’euros et distance Materis, qui réalise 428 millions sur la même période. Sa croissance s’établit à 9% sur 2006 (11% depuis janvier), soit un petit point de mieux que la moyenne de l’ensemble des autres lignes de Wendel : Materis, Editis, Deutsch, Oranje-Nassau et Stallergènes. «Bureau Veritas nous offre surtout, depuis douze ans, une rentabilité de plus de 40%», remarque Jean-Bernard Lafonta, dont la société d’investissement affiche un ANR de 6,4 milliards.

Une taille multipliée par 5

Ces douze dernières années, BV a vu sa taille multipliée par 5, passant de 300 millions d’euros de chiffre d’affaires à près de 2 milliards. Une montée en puissance assortie d’une progression de la marge, année après année. Le résultat opérationnel, 268 millions en 2006, est aujourd’hui 18 fois ce qu’il était à l’entrée de Wendel à son capital.
Une performance qui justifie largement l’enthousiasme des équipes de Wendel pour lesquelles Bureau Veritas offre d’autres vertus. Celle de son grand âge tout d’abord. Créé il y a près de 180 ans, le Bureau jouit d’une notoriété hors norme auprès d’une clientèle aujourd’hui diversifiée : la construction, l’industrie, les biens de consommation et bien sûr, la marine, son métier historique. Bureau Veritas a, en effet, démarré son activité par la classification de navires, avant de se développer dans la certification, le contrôle de conformité, les audits pour référentiels de type ISO… Autre atout de Bureau Veritas : son marché, extrêmement éclaté, estimé à près de 50 milliards d’euros. BV y revendique un rang de numéro 2 mondial derrière SGS, avec 3,6% de parts de marché. Le suisse totalise 2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Le numéro 3, le britannique Intertek, reste en dessous de la barre du milliard, à 980 millions d’euros. La croissance de BV s’inscrit donc dans la logique de consolidation du secteur. Elle passe par des acquisitions d’acteurs locaux, régionaux et parfois spécialisés comme l’Apave en France ou Dekra en Allemagne (qui a racheté Norisko à Siparex). Un exercice tout à fait du goût de Wendel Investissement qui voit, depuis douze ans, son champion grandir au fil de rachats.
Enfin, aux commandes de Bureau Veritas, Wendel peut compter sur un capitaine à la hauteur de ses ambitions : Franck Piedelièvre. Entré dans le groupe en 1995 après treize ans dans les services à l’énergie, le nouveau manager va orchestrer la politique de croissance du certificateur. Un an après son arrivée, au terme d’un tour du monde qui lui permet de prendre la mesure de l’activité du Bureau, Franck Piedelièvre pilote un premier rachat, celui du concurrent français de BV, Contrôle et Prévention. En attendant de digérer cette acquisition qui lui permet de doubler de taille en France, c’est sur la croissance organique que mise BV. Il lance une division «biens de consommation» pour le test de produits et renforce au passage sa position aux Etats-Unis et surtout en Asie. «C’est le sens de l’histoire, souligne Franck Piedelièvre, et cette division est aussi aujourd’hui l’un des plus gros contributeurs du groupe, avec un chiffre d’affaires de 260 millions d’euros, et l’une des plus rentables.» Le groupe se renforce également dans l’industrie et les infrastructures, qui représentent près d’un tiers de son activité. «C’était une implantation très française que nous avons internationalisée avec des rachats aux Etats-Unis et au Royaume-Uni notamment», souligne le Pdg.
Le build-up pour la consolisation
En 2005, le groupe a réalisé une quinzaine de nouvelles acquisitions, pour 200 millions d’euros, puis une dizaine de plus «petites affaires» l’an dernier, pour 50 millions d’euros. Une année en demi-teinte, puisque BV s’est vu souffler la reprise de l’allemand Germanischer Lloyd, qui lui aurait permis de devenir numéro 1 mondial dans la classification de navires.
Pour Jean-Bernard Lafonta, convaincre aujourd’hui du potentiel de Bureau Veritas est aisé. «Sa croissance est liée à celle de l’économie mondiale, au rythme de l’accélération de la globalisation et à la mise en place de nouvelles réglementations», résume-t-il. Le certificateur affiche aussi une activité diversifiée autour de 8 lignes de métiers qui permet de compenser un éventuel trou d’air sur un secteur.
Alors si Wendel défendait plus mollement sa réputation de société et non de fonds d’investissement, il aurait sûrement répondu favorablement à l’une des offres de firmes de private equity prêtes à faire la queue rue Taitbout. Mais rejouer le coup de Legrand est bien trop tentant… Repris en septembre 2002 et réintroduit pour 6 milliards en Bourse en avril 2006, le fabricant/distributeur de matériel électrique basse tension est toujours détenu à 40% par Wendel. «Nous garderons aussi une part significative du capital de Bureau Veritas», assure Jean-Bernard Lafonta.
  
Marie Guilhem

Repères

> 1828
création de Bureau Veritas pour l’inspection de navires
> 1919
diversification dans l’industrie
> 1988
création de BVQI, organisme indépendant de certification, devenu depuis Bureau Veritas Certification
> 1996
entrée de la CGIP au capital de la société. La holding fusionnera avec Marine-Wendel pour devenir Wendel Investissement ; reprise de Contrôle et Prévention qui permet à BV de doubler de taille en France
> 2004
Wendel Investissement passe de 30 à 99% du capital
> 2007
Bureau Veritas projette une IPO au second semestre.

Visions croisées Wendel/Bureau Veritas

Jean-Bernard Lafonta, président du directoire de Wendel, et Franck Piedelièvre, président de Bureau Veritas, reviennent sur cette longue histoire.
Private Equity : Comment jugez-vous votre collaboration ?
Jean-Bernard Lafonta : Notre relation est simple et facile depuis quinze ans, marquée par une grande fluidité et de la réactivité : nous avons donc mis en place une ligne de décision courte, rapide et efficace pour tous les projets d’acquisition. Notez que BV a aussi un passé et une histoire proche de celle de Wendel.
Franck Piedelièvre : Nous vivons ensemble depuis 1994, et avons donc appris à nous connaître. Nous avons atteint un certain niveau de connivence et des sujets n’amènent pas de débat. Par rapport à un fonds, Wendel est plus impliqué dans notre stratégie. Nos échanges s’articulent autour de 3 niveaux : conseil de surveillance, reporting mensuel et rencontres thématiques.
Private Equity : Quelles sont pour vous les qualités et les défauts principaux de votre partenaire ?
JBL : Il est extrêmement scrupuleux et attentif aux détails. Il a une vision très synthétique des enjeux stratégiques essentiels. Sa principale qualité reste le souci du détail et de l’exécution. Mais quand tout va bien, comme c’est le cas, qu’est-ce qu’on peut attendre de plus ?
FP : Je n’ai pas la réputation d’être facile à manœuvrer, mais je n’ai pas souvenir qu’on se soit jamais engueulés. Même en matière d’acquisition, Jean-Bernard Lafonta sait que je suis plus radin que lui et ses équipes. C’est lui qui nous pousse à aller plus haut au niveau du prix.
Private Equity : Que pensez-vous d’une sortie par la Bourse ?
JBL : Le secteur est particulièrement propice à la consolidation. Etre en Bourse devrait renforcer la crédibilité et la notoriété de BV, faciliter le recrutement puisque le groupe embauche 2 000 à 3 000 ingénieurs par an. Bureau Veritas aura une valorisation de plusieurs milliards d’euros.
FP : Une évolution du capital a en effet été évoquée pour 2007 et Jean-Bernard et son équipe ont eu la délicatesse de nous demander ce que nous pensions. Et ils savent que je ne suis pas forcément favorable aux solutions qui impliquent un fort effet de levier…
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