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L'histoire

Synerlab dopé à la croissance externe 31.03.14

« la composante développement est importante pour nous démarquer
de la concurrence. »
Pierre Banzet, CEO, Synerlab
© D.R.
Accompagné majoritairement pendant cinq ans par Ardian, le groupe Synerlab s’est métamorphosé. Grâce à une politique de croissance externe ambitieuse, le laboratoire est devenu un acteur majeur de la sous-traitance pharmaceutique européenne et se tourne vers l’international.
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C’est à l’initiative du fonds d’investissement Andlinger & Company et du management des laboratoires BTT que la société holding Synerlab voit le jour en janvier 2001. Son objectif était la reprise des laboratoires BTT, présents à Erstein (Bas-Rhin). Ces derniers absorbés, le jeune groupe pharmaceutique acquiert Sophartex auprès du groupe Bouchara Recordati en avril 2004, pour un montant évalué à 26 millions d’euros. L’opération propulse le groupe Synerlab dans le top 10 de la profession. Elle renforce son offre en matière de production de médicaments génériques et d’antibiotiques. Les économies d’échelle et les synergies réalisées sont significatives : mise en commun des carnets d’adresse clients, économie sur les achats d’articles de conditionnement, mise en commun des structures, et notamment mise en place d’une direction financière commune.

L’industrie pharmaceutique en restructuration. Les années 2000 sont celles de la restructuration du marché pharmaceutique. Après une forte vague de fusions-acquisitions dans les années 90, les big pharma se retrouvent en effet en surcapacité de production. « Elles doivent alors céder des centres de production, explique François Jerphagnon, managing director chez Ardian. Un phénomène qui a favorisé la reprise par des sous-traitants à des conditions favorables. De plus, la mise en place de partenariats avec le groupe revendeur permet d’assurer, pendant plusieurs années, un minimum d’activité au site industriel. Par ailleurs, autre évolution, le boom des génériques a profité à des façonniers comme Synerlab. »

Ardian, synonyme d’expansion. L’expansion de Synerlab, aujourd’hui dirigé par Pierre Banzet, commence véritablement en 2007, lorsque le groupe est repris, pour une valorisation de 90 millions d’euros, à 95 % par Axa Private Equity, devenu depuis Ardian. Le groupe réalisait alors un chiffre d’affaires de 67 millions d’euros et employait 500 personnes. « Le montage est prudent pour l’époque, puisqu’il a été structuré avec 60 % de dette et 40 % de fonds propres. Généralement, les opérations dans ce secteur se situaient plutôt autour de 70-75 % de dettes », explique François Jerphagnon. Les 5 % du capital restant reviennent au management et aux employés. « Cela a été un succès, 15 % des salariés ont investi dans le LBO. C’était un bon moyen pour développer la culture d’entreprise et aller dans la même direction », commente Pierre Banzet, qui connaît bien la société. Il a effectué la majeure partie de sa carrière au sein des laboratoires Pharmaster et BTT, avant de devenir CEO du groupe Synerlab en 2013.

Une série de Build-up. La cohésion du groupe est aussitôt mise à l’épreuve. Au tout début des années 2010, l’Afssaps, devenue l’Agence de sécurité nationale du médicament et des produits de santé, interdit le di-antalvic, médicament alors produit phare du groupe. Un coup dur qui a coûté 15 % de l’Ebitda et 10 % du chiffre d’affaires. Néanmoins, l’incident a vite été gommé par la dynamisation de la politique commerciale du groupe. C’est aussi à ce moment que Synerlab réalise sa première acquisition. Début 2010, la holding rachète Pharmaster. Basé lui aussi à Erstein, le laboratoire permet au groupe de renforcer son portefeuille de produits et sa dimension internationale, et de prendre position dans un secteur – celui des solutions stériles, ophtalmiques et auriculaires sans conservateur – en croissance de 10 % par an. « Nous souhaitions impulser un mouvement vers l’exportation et la prospection de clients dans le groupe, et Pharmaster disposait de ce savoir-faire. Nous avons pu le diffuser dans le groupe, et passer d’une politique commerciale attentiste à proactive », précise François Jerphagnon. C’est avec une telle stratégie commerciale pour se rapprocher de la demande que Synerlab va signer deux nouvelles acquisitions en 2012 : Lyofal et IDD-Tech à Orléans. Cédée par son fondateur, Jean-Luc Allemand, et quelques minoritaires, Lyofal réalise alors un chiffre d’affaires légèrement inférieur à 5 millions d’euros pour un effectif de 30 personnes. Son savoirfaire en matière de lyophilisation de produits pharmaceutiques vient compléter la gamme de compétences de Synerlab. Les actifs d’IDD-Tech, rebaptisé aujourd’hui Synerlab Développement, ont quant à eux été repris dans le cadre d’un redressement judiciaire. L’ancien site de Novartis, qui comprend une vingtaine de salariés, est spécialisé dans la formulation galénique de médicaments, notamment pour les génériqueurs, susceptibles d’être industrialisés dans les autres sites de Synerlab. Les deux acquisitions, entièrement autofinancées, ont permis de faire progresser le chiffre d’affaires du groupe de 80 millions d’euros à une fourchette comprise entre 90 et 100 millions d’euros en 2013.

Investissement à long terme. Fin 2013, Ardian, qui était actionnaire à 95 %, baisse à 38 % sa participation et réalise à l’occasion un multiple de deux dans un nouveau deal où 60 % des titres reviennent à 21 Partners. Le montage comporte une dette « senior stretched » d’un montant proche de 65 millions d’euros fournie par ICG. Il s’agit d’un financement novateur avec intérêts cash, bullet sur sept ans, comprenant des covenants un peu moins favorables qu’une unitranche et sans bons de souscription d’actions. « Quand nous sommes arrivés en 2007, nous sommes entrés avec un horizon à cinq ans mais avons toujours soutenu le groupe dans une vision à long terme. La meilleure illustration en est que six mois avant le début du processus de cession, nous avons à la fois réalisé deux acquisitions et finalisé un investissement dans une nouvelle ligne de production de Pharmaster représentant 9 millions d’euros, soit 10 % du chiffre d’affaires du groupe », conclut François Jerphagnon. Après cinq ans sous la houlette d’Ardian et avec cette stratégie de diversification, Synerlab réalise déjà 40 % de son chiffre d’affaires à l’international, un axe de développement retenu pour les années à venir, via de la croissance externe en Europe (Espagne et Italie, entre autres). « Aujourd’hui, de ce partenariat avec Ardian, nous sommes passés de deux à cinq unités de production, et de CMO (sous-traitant) à CDMO (sous-traitant de développement et de fabrication, ndlr). Cette composante développement, notamment, est importante pour nous démarquer de la concurrence », pointe Pierre Banzet. Maintenant, 21 Partners a pris le relais aux côtés d’Ardian pour accompagner la société dans ses projets de développement.

Baptiste Pourquery de Boisserin

Repères Afficher tout

> 2001 : acquisition des laboratoires BTT par Andlinger et création de Synerlab

> 2004 : Synerlab rachète les laboratoires Sophartex

> 2007 : Axa Private Equity prend 95 % du groupe, les 5 % restants revenant au management

> 2010 : rachat de Pharmaster

> 2012 : reprise d’IDD Tech, qui devient Synerlab Développement, et acquisition de Lyofal

> 2013 : Ardian réinvestit aux côtés de 21 Partners, qui acquiert Synerlab

Visions croisées Afficher tout

François Jerphagnon, managing director chez Ardian, et Pierre Banzet, CEO du groupe Synerlab

PEM : Pourquoi vous êtes-vous choisis ?
François Jerphagnon : Il y avait un bon contact humain. L’équipe de management jeune, dynamique et très efficace nous plaisait. De surcroit, le marché sous-jacent de Synerlab était attractif, et nous avons adhéré rapidement au plan de développement du groupe.

Pierre Banzet : Tout d’abord, il y a eu un « fit » humain qui ne s’est pas démenti et a grandi toute la durée de l’investissement. Axa PE était un investisseur avec une belle image, une surface de financement importante. C’était donc l’investisseur auquel il fallait s’associer. Cette collaboration nous a permis de grandir et de faire grandir le groupe.

PEM : Quelle a été votre plus grande difficulté ?
F. J. : Mis à part la perte d’un produit, nous n’avons pas eu de difficultés majeures. L’accompagnement de Synerlab est une bonne illustration d’un partenariat réussi, avec un dialogue constant et de qualité entre le management et Ardian.

P. B. : C’est sans nul doute la perte d’un produit majeur. Mais le dialogue et la confiance qui ont régné entre nous ont fait que nous avons surmonté cette phase en bonne intelligence. Nous avons su résister à la baisse des ventes, éviter tout bris de covenants, et recréer une dynamique en modifiant la stratégie avec le soutien de notre actionnaire. Le groupe en sort renforcé

PEM : Pourquoi avoir continué ce partenariat ?
F. J. : Grâce aux investissements et aux croissances externes réalisés, Synerlab est aujourd’hui beaucoup plus fort que lors de notre entrée. C’est une grande satisfaction. Nous sommes convaincus que le groupe a encore un fort potentiel : il est positionné sur des marchés en croissance, et dispose d’une clientèle et d’une implantation géographique diversifiées. Nous avons souhaité continuer de participer à son développement en restant actionnaire minoritaire.

P. B. : Nous avons continué le partenariat d’abord parce qu’Ardian a souhaité revenir, ce qui constitue une belle preuve de confiance car il est rare, dans ce type de LBO, qu’un actionnaire revienne. Pour le groupe, cela permet d’avoir un actionnariat solide, avec 21CP et Ardian, afin de poursuivre son développement, notamment à l’étranger.


 

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