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L'histoire

Flexitallic devient mondial avec Eurazeo PME 22.10.13

Sept années d’accompagnement, quatre réinvestissements, six acquisitions, une tentative de sortie : autant d’efforts pour transformer Siem Supranite, petite entreprise tricolore, en The Flexitallic Group, ETI mondialisée.
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Entre le moment où elle a été reprise par Eurazeo PME (ex-OFI PE) et sa cession à Bridgepoint en mai 2013, la petite société familiale s’est métamorphosée en un groupe multinational. De 2006 à 2013, son chiffre d’affaires a plus que décuplé tandis que ses effectifs passaient de 46 à 1250 salariés. Au passage, Eurazeo PME a réalisé une belle sortie. Valorisée 450mil lions d’euros par Bridgepoint, Flexitallic a rapporté au financier une plus-value de 95 mil lions d’euros et un multiple de 2,9 fois son investissement. « Flexitallic est un très bel exemple de notre capacité à transformer une PME française en une ETI mondialisée », se félicite Olivier Millet, président du directoire d’Eurazeo PME, qui a veillé avec son équipe sur la participation tout au long de ces années de croissance.

PREMIER VIRAGE : L’ACQUISITION DE FLEXITALLIC AUX ÉTATS-UNIS. Lorsque le fonds d’investissement s’y est intéressé, Siem Supranite venait de passer deux ans aux mains de deux investisseurs financiers, Pierre Baelen et François de Gaillard, fondateurs de la société d’investissement BG Industries. Cédée en 2004 par le petit-fils de son fondateur, la société était depuis l’après-guerre distributeur dans l’Hexagone se met sur les rangs, réalise les due diligences et trouve des banques américaines pour financer l’opération. Mais la première difficulté survient. En pleine crise des subprimes (été 2007), les banques américaines initialement envisagées renoncent à financer le build-up. C’est finalement la banque islandaise Landsbanki qui apporte la dette senior, syndiquée auprès de deux banques américaines. AXA PE et Capzanine prêtent main-forte à OFI PE en mezzanine et en equity pour financer l’acquisition. Le rapprochement entre les deux entités permet de constituer l’un des leaders mondiaux de l’étanchéité : comptant alors un peu moins de 400 salariés, le nouveau groupe fournit de Flexitallic, un fabricant américain de joints d’étanchéité destinés aux industriels du raffinage, de la pétrochimie et du nucléaire. En octobre 2006, ses deux repreneurs cèdent une large majorité de leurs parts à OFI Private Equity. Dès le départ, le nouvel actionnaire, intéressé par le potentiel de développement de l’entreprise, avait envisagé une opération assez ambitieuse : une éventuelle reprise par la PME de son fournisseur américain, qui pesait alors trois fois plus que Siem. L’occasion ne s’est fait pas attendre. Début 2007, le fonds Cravey Green & Wahlen, propriétaire de Flexitallic, met son actif en vente. Tout en préparant sa propre introduction en Bourse, OFI PE  les principaux acteurs des secteurs para - pétrolier, chimique et nucléaire, comme Shell, Total, Schlumberger, Baker Hughes… À travers cette opération, la PME française a franchi un premier cap : d’une part, l’acquisition de son principal fournisseur lui permet de sécuriser ses approvisionnements. D’autre part, elle ouvre le chemin de l’internationalisation en prenant pied aux États-Unis, à Houston, en plein cœur de l’activité pétrochimique. Fort de ce premier succès, le groupe enchaîne d’autres opérations. En 2008, une usine est ouverte à Suzhou près de Shanghai, le groupe fait l’acquisition de Novus Sealing en Angleterre, une jointventure est montée au Mexique. En 2009, les usines anglaises sont regroupées au sein d’une nouvelle implantation adjacente au site de Novus Sealing, tandis qu’une nouvelle entité est ouverte aux Émirats Arabes Unis. Et une joint-venture est montée au Kazakhstan en 2010.

NOUVEAU DÉPART APRÈS UN PROCESSUS DE SORTIE INFRUCTUEUX. La crise de 2009 freine cependant les velléités d’expansion. Subissant un recul de 17% de son chiffre d’affaires (principalement aux États-Unis) et une contraction de son Ebitda, le groupe, bien qu’excédentaire en cash flows, casse ses covenants bancaires américains. Les covenants sont donc renégociés et les actionnaires remettent de l’equity, avant le redémarrage de l’activité en 2010. Puis BGI, détenteur d’environ 20% du capital, s’éloigne de la société. Rothschild et DC Advisory sont mandatés pour mener un processus de cession qui, après un premier emballement, retombe comme un soufflé. Dans un premier temps, une quarantaine de candidats se bousculent et proposent des offres entre 170 et 210 millions d’euros ; puis les valorisations retombent dans une zone jugée décevante par les actionnaires. «Nous pouvions réaliser deux fois notre mise ou réinvestir », se souvient Olivier Millet. Nous avons finalement choisi de réinvestir, avec l’accord et le plein sou - tien financier d’Eurazeo, que nous venions de rejoindre. » Une fois les minoritaires sortis, la dette française et américaine est refinancée en une seule dette unitranche multidevises montée par AXA PE. European Capital et Capzanine se joignent au financement, pendant que Cathay Capital entre au capital du groupe à cette occasion. Afin de poursuivre le développement, une ligne de Capex est montée pour financer les prochaines acquisitions ; notamment, celle d’AGS, une société canadienne convoitée depuis 2009 et acquise en janvier 2012. Basée dans l’Alberta, AGS emploie 260 personnes et pèse 55 millions de dollars canadiens. Cette acquisition engage le basculement stratégique du groupe vers les métiers de l’«upstream» (extraction), complémentaire à son positionnement historique vers le «downstream» (raffinage). La reprise de Custom Rubber Products, fin 2012, confirme cette orientation. Avec cette société texane, le groupe passe la barre des 200 millions d’euros de chiffre d’affaires et devient le seul fournisseur de joints d’étanchéité offrant des produits sur le downstream, l’upstream et le nucléaire. Ayant fait la preuve de sa résilience et de ses capacités de développement, Flexitallic rentre à nouveau dans le radar du private equity européen. Lorsque Bridgepoint contacte Eurazeo PME, l’investisseur doit arbitrer entre la possibilité de sortir et la poursuite de la transformation en leader mondial de la société française. Compte tenu de son poids de 60% dans le portefeuille d’Eurazeo PME, c’est la première solution qui l’emporte. Aujourd’hui, avec le soutien de son nouvel actionnaire, Flexitallic se prépare à grandir encore, comptant doubler de taille dans les cinq prochaines années. Eurazeo PME reste actionnaire, avec moins de 5%, afin de poursuivre cette histoire de croissance et de mondialisation.

Florence Klein

Repères

> 2004 : Siem Supranite (CA 16 M€) est repris par Baelen Gaillard Industries

> 2006 : Acquisition de Siem Supranite (CA 20 M€, 46 salariés) par OFI Private Equity (futur Eurazeo PME). Siem est valorisé 38 M€.

> 2007 : Acquisition par Siem de Flexitallic (CA 56 M€), son premier fournisseur, basé à Houston, Texas.

> 2008 : Ouverture d’une usine en Chine. Rachat de Novus Sea ling au Royaume-Uni (CA 15 M€).

> 2009 : Implantation aux Émirats Arabes Unis.

> 2010 : Ouverture d’une joint-venture au Kazakhstan.

> 2011 : Réorganisation du capital, renforcement d’Eurazeo PME. Mise en place d’un financement unitranche.

> 2012 : Acquisition de la société canadienne AGS.

> Janvier 2013 : Acquisition de Custom Rubber Products (USA).

> Mai 2013 : Eurazeo PME cède le contrôle de Flexitallic (210 M€, 1250 salariés) à Bridgepoint pour 450 M€.

Visions croisées

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    Olivier Millet
    Olivier Millet
    © D.R.

Olivier Millet, président du directoires d'Eurazeo PME et Eric Toledano, président-directeur général de The Flexitallic Group.

 

PE MAG : Comment la transformation de la PME Siem en un leader mondialisé a-t-elle eu lieu ?

Olivier Millet : L’histoire ne s’est pas écrite en un jour ! Une telle transformation est le fruit de beau coup de travail, d’im plication, mais aussi d’un plaisir professionnel partagé. Nous nous sommes en effet ap - puyés sur une équipe dirigeante talentueuse et engagée, dont le savoir-faire a permis à la société de franchir les différentes étapes de sa progression.

Rémi Toledano : Initia - lement, la présence de BGI à notre capital a aidé Siem à se familiariser avec le private equity, passant d’un actionnariat familial à un actionnariat professionnel. Par l a suite, la pr ésence d’Eu raz eo PME nous a donnés les moyens financiers, mais également humains et stratégiques , pour ré ussir n otre développement sur plusieurs continents.   

PE MAG : L’histoire du groupe a été riche en rebondissements. Comment les avez-vous gérés ?

O. M. : Avec sang-froid et dans le temps, c’est notre métier. La transformation d’une entreprise ne s’écrit pas de manière linéaire, et cela s’est traduit par la nécessité de faire évoluer, aussi souvent que nécessaire, la structure du bilan et du financement. Avec un investissement cumulé de 50 M¤, nous avons investi quatre fois en equity. Par ailleurs, il a fallu adapter les financements aux aléas du marché bancaire et à la structure multidevises du bilan. Le soutien d’AXA PE, de Capzanine, d’European Capital et de Cathay Capital a été crucial pour y parvenir.

R. T. : À toutes les phases de notre développement, Eurazeo PME nous a soutenus. Et cela malgré la difficulté et le risque que comportaient nos acquisitions successives d’entreprises, dans le monde entier. Grâce à ce soutien, Flexitallic est aujourd’hui présent au plus près de ses clients, les plus grands noms de l’énergie, à qui nous proposons des solutions et un service de haute qualité au moyen d’une politique d’innovation et de R&D soutenue.

PE MAG : Quel bilan faites-vous de votre sortie ?

O. M. : Après une première phase de croissance menée entre 2006 et 2011, nous avons choisi de poursuivre l’accompagnement de Flexitallic dans son expansion internationale. Cela a été l’occasion d’amorcer son positionnement vers l’upstream, et d’acquérir deux entreprises en Amé ri - que du Nord. Ce choix a été judicieux, puisque notre sortie a eu lieu moins de deux ans plus tard, au terme d’un processus très confidentiel mené sous l’égide de Leonardo & Co.

R. T. : Le soutien d’Eurazeo PME nous a permis de devenir une référence mondiale auprès des industriels de l’énergie et de la chimie. Le choix de notre nouvel actionnaire correspond à l’ambition de Flexitallic : doubler de taille dans les cinq prochaines années.

  

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