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L'histoire

Emeraude International rayonne avec CM-CIC LBO Partners 27.02.13

Emeraude International rayonne avec CM-CIC LBO Partners
Emeraude International, négociant en polymères fortement exposé aux marchés émergents et notamment à l’Afrique, a pu faire peur à certains investisseurs. CM-CIC LBO Partners a su voir en cette société un leader international, et a accompagné son déploiement vers l’Est.
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Emeraude International rayonne avec CM-CIC LBO Partners
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Emeraude, couleur de la mer et couleur des entreprises skippées par une famille férue de navigation : le grand-père a créé une ligne de ferries Saint- Malo–Jersey, la mère gère une société de matériel pour la voile et le père une entreprise de négoce de produits chimiques transportés par bateau à destination de l’Afrique. Cette dernière société, Emeraude International, a été reprise par le fils, Yann Bucaille, amateur de régates. Ce diplômé de l’EM Lyon, qui a travaillé chez Danone, arrive dans les années 1990 dans l’entreprise qui compte cinq personnes et réalise 70% de son chiffre d’affaires en Côte d’Ivoire, le reste provenant du Cameroun et du Sénégal. Les ventes du négociant tournent alors autour de 25 millions d’euros. «Mon père souhaitait céder sa société, or son métier est fondé sur un fort relationnel avec les contacts locaux, ce qui représente un gros risque pour un acquéreur », retrace Yann Bucaille. Il prend donc la barre d’Emeraude International avant d’avoir 30 ans, et s’endette pour racheter les parts de la famille. Lui aussi fonctionne au contact, et a noué des relations de confiance avec ses clients africains. Or, le coup d’État de 1999 en Côte d’Ivoire va être son baptême du feu. Le pays est complètement bloqué, et les usines de ses clients ont été pillées. Le jeune patron fait quand même le déplacement, note dans quels délais il pourra être réglé, et prend de nouvelles commandes. « Je ne referais plus cela aujourd’hui, j’étais jeune et un peu “tête brûlée” à l’époque, admet-il. Nous avons certes repris le marché local lorsque la situation s’est calmée, mais cela a surtout nourri une obsession : la diversification des pays couverts pour mutualiser les risques. »

LA COURSE À L’EXPANSION. Le dirigeant détermine alors deux caps : l’expansion géographique, pour faire baisser les risques par pays, et la réduction du nombre de produits proposés. En effet, Emeraude se fournit auprès de grands groupes pétroliers comme Exxon ou Total, et doit rester un client de taille suffisante pour peser dans les négociations. La décision est prise de privilégier les polyoléfines. Concrètement, ce sont des billes de plastique utilisées dans la fabrication d’emballages, de contenants, de bâches, etc. Le plan est déroulé : en 2007, Emeraude travaille dans 50 pays, et le chiffre d’affaires de la Côte d’Ivoire représente moins de 10%. Yann Bucaille choisit alors d’ouvrir son capital. « J’ai cherché un partenaire qui nous permette de structurer encore plus la société et qui fasse participer les équipes au capital, souligne-t-il. En effet, nous exerçons un métier fondé sur l’humain, c’est pourquoi les managers doivent être fidélisés. » Le dossier, bien qu’un peu atypique, retient l’attention de CM-CIC LBO Partners : « Beaucoup de postulants ont eu une lecture au premier degré du dossier, pointe Bertrand Fesneau, président du directoire de CM-CIC LBO Partners. L’exposition à l’Afrique et au pétrole a pu en faire reculer certains. Nous avons pensé au contraire qu’Emeraude était un leader sur le continent africain, et que sa prestation de négoce n’impliquait pas de gestion de stocks, et donc pas de risques liés au cours du pétrole. Nous avons misé sur une société contracyclique dotée de sous-jacents en forte croissance. » Malgré le contexte économique de la crise des subprimes, le deal où le fonds est majoritaire trouve une solution de financement avec une dette senior en deux tranches et une mezzanine fournie par Acto.

GARDER DU SOUFFLE POUR LA CROISSANCE ORGANIQUE. Emeraude s’est fixé pour objectif de continuer à croître dans les pays émergents. Pour cela, le levier mis en place laisse à l’entreprise de quoi se développer. « Nous avons montré notre capacité à structurer l’opération sur le plan financier, indique Bertrand Fesneau. Il y avait de fortes lignes de crédit pour financer l’activité à court terme. Il a donc fallu élaborer un package avec la dette LBO haut de bilan et la dette d’exploitation du bas avec les nombreuses banques du pool. Ce processus s’est révélé long et laborieux. » Une fois l’opération ficelée, les axes de progression identifiés par les actionnaires concernent la mise en place d’un reporting aux standards financiers et un pilotage fin de la trésorerie. Le temps d’implémenter ces outils, Emeraude a connu un dérapage par rapport à ses prévisions, mais qui a pu être maîtrisé et remonté. En effet, la conquête de nouveaux territoires continue pour la société : l’Afrique anglophone, le Maghreb, puis le Moyen-Orient, l’Inde et l’Asie. « L’ouverture du bureau de Dubai a déplacé le barycentre de la société, illustre Bertrand Fesneau, et a lancé l’expansion vers le sous-continent indien qui a permis de toucher une région où la consommation de polymères est en forte croissance. »

LE VRAI JOYAU, CE SONT LES HOMMES. Les bons résultats d’Emeraude conduisent Yann Bucaille à augmenter la dotation de l’entreprise à sa fondation personnelle, qui finance des associations et des ONG. « C’est un symbole mais c’est important : j’ai informé CM-CIC LBO Partners de cette hausse de contribution qui, in fine, représente un manque à gagner pour eux, détaille Yann Bucaille. Ils ont trouvé cela formidable. C’est pour cette raison que je considère que leur intérêt n’est pas uniquement financier. » Idem lorsque le dirigeant décide de prendre un peu de recul sur l’opérationnel pour se consacrer davantage aux actions humanitaires, l’actionnaire financier l’accompagne de bonne grâce dans la sélection d’un nouveau directeur général. Finalement, la promotion interne d’Umar Rafique est retenue en 2010. Pakistanais, celui-ci a su développer l’activité en Afrique anglophone et pilote le bureau de Dubai ; il illustre bien le côté multiculturel de l’entreprise, laquelle compte plus de 15 nationalités. Enfin, en 2012, la société a atteint 300 millions d’euros de chiffre d’affaires sur 60 pays, et le temps de la sortie arrive. Le process est remporté par l’IDI, ce qui permet à CM-CIC LBO Partners de réaliser un TRI de 28% et un multiple de 3. « Pour la sortie, nous n’avons pas été dogmatiques sur le profil de l’acquéreur, mais il semblait que dans ce format, la société pouvait rester indépendante grâce à un fonds », relate Bertrand Fesneau. Emeraude peut ainsi voguer vers de nouveaux horizons.

Laurence Pochard

Repères

> 1986 : Création d’Emeraude International

> 1999 : Coup d’État en Côte d’Ivoire, et volonté de diversification géographique

> 2000 : 30 M€ de CA

> 2005 : Ouverture du bureau de Shangai

> 2006 : 170 M€ de CA Ouverture du bureau de Dubai

> 2007 : Entrée de CM-CIC LBO Partners au capital

> 2010 : Changement de DG : Umar Rafique remplace Yann Bucaille, qui reste président

> 2011 : 300 M€ de CA, dont moins de 5% en Europe Sortie de CM-CIC LBO ; l’IDI prend 45% des parts, le management 55%

> De 2010 à 2012 : Ouverture de bureaux en Algérie, en Afrique du Sud et au Pakistan

Visions croisées

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